Les ovnis nazis du Père Noël ou les étranges avatars du mythe polaire (3)

Les ovnis nazis du Père Noël ou les étranges avatars du mythe polaire (3)

Soumis par Antonio Dominguez Leiva le 23/04/2021

 

La cristallisation du mythe des ovnis nazis de l´Antarctique, alliée à la survie du Führer s´opère dans le pamphlet du ex-nazi négationniste émigré au Canada Ernst Zündel UFOs: Nazi Secret Weapon? (1975) : « Il apparaît maintenant un schéma distinct, dans une séquence de dates et d'heures appropriées, qui laisse entrevoir un lien possible entre l'apparition d'OVNIs en grand nombre et la survie éventuelle d'Hitler et sa fuite de Berlin », y lit-on dans la préface. Après des longs développements à partir des différentes spéculations des divers « inventeurs » supposés des soucoupes nazies, Zündel réecrit de manière totalement fantastique l´expédition de Byrd, qui alimentait déjà les nouvelles spéculations sur la Terre Creuse :

« La mission avait pour tâche "d'observer les activités d'une puissance étrangère dans la région du pôle Sud". Interrogé sur cette partie des activités de l'expédition, l'amiral Byrd aurait répondu [belle formule pour introduire un mensonge éhonté] : "briser la dernière résistance désespérée d'Adolf Hitler, au cas où nous le trouverions dans son Neuberchtesgaden à l'intérieur du "New Schwabenland" dans la région de la Reine Maud, ou le détruire". (…) L'expédition américaine est arrivée et a débarqué en Antarctique avec les derniers équipements et gadgets militaires, des chars amphibies aux véhicules de transport de troupes, en passant par les hélicoptères, les hydravions et tous les autres appareils militaires imaginables. (…) Parmi tous les vols rapportés, il en est un qui se démarque et dans lequel l'amiral Byrd lui-même était à bord. Les instruments se sont complètement détraqués, les jauges de performance et les altimètres se sont comportés de manière très erratique, ce qui a amené l'amiral Byrd à interrompre le vol et à rentrer à la base en contrôle "visuel". (…) Il a été rapporté par les journaux et les sources précédemment mentionnées ici, que l'amiral Byrd avait localisé la base secrète nazie et s'en approchait lorsque l'incident ci-dessus a eu lieu, provoquant l'abandon du vol, mais pas avant qu'il ait largué un drapeau américain (certains rapports mentionnent une bombe) à l'endroit approximatif de la base. Il s'agissait sans aucun doute d'avertir Hitler qu'il n'était pas entièrement en sécurité, même dans son "nouveau Berchtesgaden" ou, comme l'appelle un auteur [?], le « Shangri-la d'Hitler ». La vengeance fut apparemment rapide et il semble que le Führer ne se laissa pas faire. En 48 heures, quatre des avions de Byrd ont été perdus, certains sans trace et d'autres sans aucun survivant. (Voir les sites de crashs marqués sur la carte). L'amiral Byrd abandonne précipitamment tous ses efforts et débarque, avec toutes ses forces, pour rentrer chez lui... » (éd. En ligne sur Internet Digital Archive)

Fabulation et logique paranoïaque fusionnent pour nourrir une parfaite manipulation non seulement de la simple vérité historique (allant de l´altération des citations jusqu´à la pure invention) mais aussi du discours ufologique au profit de l´idéologie néo-nazie. « Les OVNIs empêcheront sans doute la guerre atomique d'empêcher l'extinction de la race blanche. Actuellement, les Blancs sont dix fois plus nombreux que les autres sur la planète et s'il y avait un échange atomique, le rapport serait de cent contre un en notre défaveur. Aucun homme du calibre d'Adolf Hitler, profondément engagé dans la survie et la résurgence de la culture occidentale, ne permettrait jamais que cette tragédie arrive à la race blanche »…

Le délire ne s´arrête pas là. Jouant de la bivalence du mythe ufologique entre hypothèse extraterrestre et hypothèse terrestre (qu´on peut nommer, en reprennant la célèbre formule du président Dwight D. Eisenhower, du « complexe militaro-industriel »), Zündel les fusionne toutes deux en y ajoutant l´ésotérisme sulfureux nazi remis à la mode par Pauwels et Bergier, sans doute espérant profiter de leur immense succès commercial et idéologique :

« Les scientifiques d'Hitler ont-ils accompli leur "miracle" seuls, sans aide, ou bien des "gens" des soucoupes volantes, peut-être des visiteurs d'autres galaxies, leur ont-ils donné un coup de main parce qu'ils maîtrisaient la nouvelle technologie et parlaient par conséquent le même langage technologique ou du moins un langage similaire ? Cela serait-il possible ? Une autre question pourrait être la suivante : les nazis ont-ils découvert de profonds secrets longtemps cachés au cours de leurs longues et exhaustives expéditions dans l'Himalaya et l'ancien Tibet ? Des volumes intrigants et fascinants ont été écrits sur ces activités mystérieuses qui avaient le soutien actif et la bénédiction d'hommes tels que Heinrich Himmler. Il a été rapporté que la S.S. possédait une très grande collection de livres occultes et de transcriptions médiévales d'alchimie et de sorcellerie. Apparemment, plus de 20 000 volumes étaient, à un moment donné, conservés à l'Ordensburg, Sonthofen, en Bavière ».

Faisant feu de tout bois, il reprend aussi la rhétorique des questions captieuses systématisée par Le Matin des Magiciens ainsi que plusieurs des thèmes qui y sont abordés: « Peut-être y a-t-il des éléments de vérité dans toutes ces histoires. Les nazis ont-ils établi des bases secrètes en Antarctique ? Ont-ils perfectionné là-bas un programme de soucoupes volantes très avancé ? Ont-ils découvert par hasard, au cours de leurs nombreuses expéditions, qu'il existe bel et bien une "Terre Creuse" ? (Les légendes et sagas nordiques ont longtemps raconté des histoires très inspirantes d'une société parfaite de géants germaniques blonds aux yeux bleus qui vivaient dans la Terre intérieure). Le monde n'a-t-il pas été stupéfait lorsqu'on a appris en 1945 que de nombreux dirigeants nazis avaient été des membres de la première heure (1918-20) de l'Ordre secret de Thulé ? (…) Il est donc tout à fait concevable que les nazis aient été les représentants terrestres des géants blonds aux yeux bleus de la "terre intérieure" ou de l'"espace extérieur" qui hantent les légendes nordiques, incas, aztèques et même indiennes d'Amérique du Nord »[1].

Masquant sans cesse ses propres contradictions logiques, il manipule aussi les arguments sceptiques pour défendre l´hypothèse « terrestre » afin de mieux renvoyer au mythe néo-hitlérien[2]. Puis, aussitôt, c´est la théorie des Anciens Astronautes popularisée par Däniken qui est invoquée, embrigadée dans la cause néo-nazie : « Il n'est pas inconcevable que, dans le flot sans fin du temps, notre race soit partie d'ici "là-bas" ou que nous ayons été débarqués ou échoués ici depuis "là-bas" il y a des lustres. Les légendes et les sagas d'antan peuvent fournir de nombreux indices. Cela pourrait-il signifier que la nation allemande est effectivement une colonie, soit des "Saturniens" germanophones avec lesquels Reinhold Schmidt a conversé, soit de la tête de pont terrestre de la civilisation terrestre intérieure mentionnée précédemment ? Serait-ce la réponse à l'épineuse question de savoir pourquoi les Allemands sont "différents" ? Est-ce là l'explication de leurs superbes performances et de leur génie en tant que soldats ? Sont-ils à la tête du monde en matière d'ingénierie de précision et de technologie parce qu'ils abritent parmi eux un nombre disproportionné de "Saturniens" ou d'"Atlantes" ? Serait-ce la raison pour laquelle ils renaissent toujours plus forts, comme un phénix, des cendres de la défaite ? Hitler a-t-il été implanté sur cette planète Terre pour tirer la civilisation occidentale du bord de l'auto-extinction dégénérée - pacifiquement, si possible - par la guerre, si nécessaire ? » (Ibid)

Étrangement, cette perspective, clairement souhaitée par l´auteur implicite, est présenté selon la topique paranoïaque des récits d´invasion, concluant même par un appel à la vigilence qui évoque irrémédiablement la célèbre conclusion de The Thing From Another World (« Keep Watching the Skies! ») :

« Si la réponse à cette question est affirmative, alors "Le dernier bataillon", lorsque le moment sera venu, entrera en action. Avec les conflits raciaux et le désastre économique qui se profilent à l'horizon, à quelle distance "Le Jour » (« Der Tag") peut-il bien se trouver ? Les membres du "Dernier Bataillon" sont déjà parmi nous, qu'ils soient soldats, ouvriers, enseignants, étudiants, scientifiques - en fait, dans toutes les couches de la société. Hommes et femmes, jeunes et vieux. Alors regardez vos voisins et vos amis - combien d'entre eux appartiennent, selon vous, au "dernier bataillon" ? Le temps nous le dira! » (Ibid).

Zündel assummait pleinement sa stratégie à la fois commerciale et idéologique : « J'ai réalisé que les Nord-Américains n'étaient pas intéressés par le fait d'être éduqués. Ils veulent être divertis », déclara-t-il au journaliste de la Skeptics Society Frank Miele. « Avec une photo du Führer sur la couverture et des soucoupes volantes sortant de l'Antarctique, c'était l'occasion de participer à des émissions de radio et de télévision. Pendant environ 15 minutes d'un programme d'une heure, je parlais de ces trucs ésotériques. Puis je commençais à parler de tous ces scientifiques juifs dans les camps de concentration, travaillant sur ces armes secrètes. Et c'était ma chance de parler de ce dont je voulais parler… ». Soit la négation de l´Holocauste, affirmée sans ambages dans un autre ouvrage qui lui vaudrait d´être déporté et emprisonné en Allemagne.

"Maintenez-vous toujours ce que vous avez écrit dans le livre sur les ovnis ?". "Regardez", a-t-il répondu, "il y a un point d'interrogation à la fin du titre". [...] Zündel fera miroiter une référence aux OVNI ou à la sagesse des anciens Atlantes. Si cela n'a aucun effet, il passe à autre chose. Si elle suscite le scepticisme, il l'envoie balader avec un jovial "pour ce que ça vaut". Compte tenu de notre première conversation, je ne suis toujours pas sûr que Zündel croit vraiment à tous ces trucs ésotériques ou qu'il a simplement appris à quel point il est efficace de pousser les boutons sensibles pour attirer l'attention des médias et peut-être obtenir des dons » (Skeptic Magazine, v.2, n.4, 1996).

Zündel multiplia ces idées dans deux autres publications, Secret Nazi Polar Expeditions (1978) et Hitler at the South Pole (1979). La première reprend la théorie de la Terre Creuse, reliant ainsi les deux pôles de l´imaginaire polaire, si l´on ose dire, l´Hyperborée primordiale et l´Antarctique de tous les mystères. Les opérations secrètes des U-Boats quittant la Norvège à la fin de la guerre deviennent la clé de cette nouvelle Quête : « Il est évident que l'Allemagne nazie préparait quelque chose d'énorme, mais quoi ? Y avait-il un raccourci de l'Arctique à l'Antarctique ? Les expéditions nazies ont-elles découvert un chemin plus direct vers l'Antarctique via le Groenland, le Spitzberg ou le pôle Nord ? Seul le temps nous dira ce qu'il y a réellement là-haut ou là-bas, ou devrions-nous dire, là-dedans ? »[3]. D´où l´idée, cette même année, d´une grande expédition, annoncée dans le bulletin de l´obscure publication torontoise contrôlée par Zündel, Samisdat Publishers :

            « ACHTUNG ! EXPEDITION SAMISDAT TERRE CREUSE $9999.00

À LA RECHERCHE DE TROUS DANS LES PÔLES

RECHERCHE DES BASES ANTARCTIQUES DES OVNIS D'HITLER »

(…) Pour le chercheur d'OVNI vraiment dévoué, SAMISDAT s'embarque dans une

une expérience magnifique et impressionnante ! Nous sommes en train de négocier avec plusieurs compagnies aériennes internationales et des transporteurs aériens affrétés en ce qui concerne notre projet de la "Théorie de la Terre Creuse" et de notre recherche des « bases des soucoupes volantes d'Hitler en Antarctique". (…)  L'expédition antarctique de SAMISDAT à la recherche des bases des soucoupes volantes d'Hitler et de l'ouverture polaire sud vers la Terre Intérieure sera l'événement unique de toute une vie. Le nombre de personnes pouvant être accueillies étant très limité, nos critères de sélection sont nécessairement rigoureux. Le coût approximatif par personne pour cette expédition peut s'élever à 9 999,00 $ ».         

Ce projet farfelu ne vit, à notre connaissance, jamais le jour. Mais, cette même année, le Chilien Miguel Serrano, toujours obsédé par la survie du Führer, intègre le mythe des ovnis nazis dans sa très étrange cosmologie hitlérienne. On apprend ainsi dans El Cordón Dorado : Hitlerismo Esotérico (1978) qu´Hitler s´est refugié dans une base secrète sous la glace de l´Antarctique où les survivants nazis se sont alliés aux anciens Hyperboréens qui ont colonisé l´intérieur de la Terre Creuse depuis des temps immémoriaux. C´est grâce à leur technologie antigravitationnelle qu´ils ont pu développer les soucoupes qui sillonnent sans cesse le globe, « pilotées par le "Dernier Bataillon", par le Wildes Heer, l'Armée Spirituelle d'Odin, composée par les héros déchus, déjà immortels, pour lutter contre le Rogna Rokkr [sic], le Destin des Ténèbres, qui est projeté sur le Monde depuis une époque lointaine. Ce dernier bataillon interviendra au plus fort de la Grande Catastrophe. Et ce sera celui qui survivra » (En ligne sur Internet Archive).

Suivant les théories de Van Däniken, les vaisseaux volants auraient déjà représentés dans les textes indiens les plus anciens, renvoyant à une origine extraterrestre primordiale. Comme chez Palmer et Bernard, les OVNIS ne viennent pas du Ciel mais de la Terre Creuse, refuge de tous les initiés : « L'Autre Science n'aurait été redécouverte qu'en 1945, à la surface de la terre. L'intérieur aurait toujours été préservé. Les pouvoirs antigravitationnels du Soi inconnu, du Vril ». Cette inversion de la verticalité rejoint une rêverie pour ainsi dire horizontale autour des univers parallèles, reliés au nôtre par des « trous astraux » : « Les extrêmes polaires ne s'ouvrent pas seulement sur le monde intérieur ; ils ont aussi une "fenêtre" ou une "sortie" vers les mondes invisibles et parallèles, vers les quatrième et cinquième dimensions. C'est le moyen de sortir des mondes analogues et d'y entrer. C´est par là que sont arrivés les êtres des étoiles, les Hyperboréens, et que pénètrent les messages des autres. (...) C'est là que les OVNIs partent vers des galaxies lointaines... » (Id).

C´est ainsi que, réfugié pour un temps dans son oasis tropical sous les glaces, Hitler est peut-être allé rejoindre la patrie primordiale des Hyperboréens au-delà de notre galaxie, dans cette « autre constellation plus proche du Soleil Noir, reflet du Rayon Vert » ou ses ancêtres retournèrent « dans leurs Vimanas, volant "plus vite que la pensée ", poussés par la musique cosmique des sphères ? » (Ibid).

Le mythe des ovnis nazis de l´Antarctique revient sous une forme encore plus délirante dans le dernier volume de la « trilogie hitlérienne » de Miguel Serrano, Adolf Hitler, el Último Avatãra (1984). Les énergies d´Hitler pendant la guerre auraient été concentrées dans des expériences de "réalisme magique" (étrange réapproriation du terme esthétique introduit par Franz Roh), incluant la construction de soucoupes volantes, la dématérialisation et l´exploration des Pôles. Lors de la chute de Berlin, il se serait refugié dans la Terre Creuse: « Est-ce que les sous-marins allemands autour du Pôle Nord ou du Groenland de John Dee ont trouvé le point exact où, comme par un entonnoir noir, leur navire est passé, entrant pour se connecter à l'autre pôle, sortant vers cette terre et cette mer paradisiaque qui, après avoir été là, ne le sont plus ? Un paradis imprenable, d'où la guerre se poursuit, pour être gagnée. Car tout ce qui est perdu ici est gagné là-bas. Le site de l'âge d'or, l'Ultime Thulé, l'Hyperborée, l'autre côté des choses, si facile et si difficile à atteindre. La Terre intérieure, l'Autre Terre, l'Anti-Terre, la Terre astrale, que l'on atteint comme par un "clic", une bi-location, ou tri-location dans l'espace » (En ligne sur Internet Archive).

Encore une fois, de manière obsessionnelle, on revient au « départ d'Hitler avec ses véritables forces spéciales, dans un sous-marin ou un ovni. Je penche pour cette dernière hypothèse, dans un vimana. En tout cas, s'il n'en était pas ainsi, alors ces Disques Volants seront achevés à la perfection dans le "refuge imprenable du Führer", dans son "Paradis terrestre » que les Guides hyperboréens auront préparé pour l'accomplissement ultime de la Destinée. Dans le Paradesha, dans l'Hyperborée subpolaire ». Mais cela aussi ne saurait être qu´une étape : « D'ailleurs, il n'y sera pas, car le paradis a cessé d'être terrestre. Les vimanas, les étoiles, l'auront depuis longtemps emmené vers d'autres étoiles, tournant à la vitesse et dans la direction du svastika de gauche. Et peut-être est-il maintenant dans la vraie maison des anciens Hyperboréens, la patrie originelle des Aryens et des Dieux Blancs, le Green Thunderbolt, traversant la Porte de l'Étoile du Matin, Oiyehue et à travers le Soleil Noir » (ibid).

Dans ce bric-à-brac indigeste qui se veut poétique et qui n´est généralement qu´indigeste on n´est jamais à l´abri des contradictions. C´est ainsi que dans un autre passage la fuite polaire du Führer se transforme en désincarnation mystique ou en étrange téléportation, fusionnant l´allusion hindouiste de l´Avatar qui préside au titre de l´« essai » avec des motifs science-fictionnels : « La vérité ultime de la Svastika de gauche n'est pas accomplie dans ce monde spatio-temporel. Ce n'est donc pas une route, mais un virage qui sort de Maya et Samsara, de l'espace-temps démiurgique et tirée par un Centre, ou Soleil Noir, vers une Autre Réalité, vers une Éternité que nous avons appelé le Tonnerre Vert et qui est une Fleur Ultime. (…) Lorsque le cercle du svastika tourne à une vitesse fantasmagorique, il y a transformation en un Vimana, brisant les lois de la gravité, permettant le saut dans une autre dimension. Et c'est ainsi que le Führer quitta ce monde... (…) L'Avatar du Führer est venu et reparti. Et les Russes ont trouvé quatorze cadavres brûlés d'Hitler, chacun identique à lui-même » (Ibid).

Quoiqu´il en soit, les soucoupes deviennent l´emblème d´une extension cosmique de l´hitlérisme, ainsi que de son retour messianique, réactualisant des vieux schémas mythologiques : « L'OVNI, Vimana de la rune Hagal, est le svastika tournant dans la direction de l'étoile du matin. Étoile double de l'hitlérisme ésotérique, Wotan. Étoile de l'initiation hyperboréenne. C'est le véhicule dans lequel le Führer reviendra quand son heure sera venue » (Ibid).

Selon sa logique agglutinante, Serrano cite aussi le magazine Das Neue Zeitalter (numéro 22, 1980) pour incorporer la théorie extraterrestre au mythe : "Depuis 1946," peut-on y lire, "les premières soucoupes volantes sont venues de l'Antarctique. Ces soucoupes ont non seulement visité des régions distinctes de la mais aussi d'autres planètes du système solaire. Il est tout à fait possible que les soucoupes volantes avec des formes de vie provenant d'autres planètes aient déjà pris contact avec les habitants de la "Nouveau Souabe". Avec leur aide et leur assistance, ils ont peut-être déjà développé sur notre planète une science complètement différente et très avancée, dans les bases allemandes du Troisième Reich, avec des implications cosmiques étendues. Vu sous cet angle, ni les États-Unis d'Amérique, ni la Russie soviétique ne sont des puissances mondiales de premier plan. Neuschwabenland, en Antarctique, a une vaste supériorité technologique » (Ibid).

Il s´agit surtout pour Serrano de retrouver cette sorte de figure paternelle ultime que, dans son « roman familial » névrosé, incarne le dictateur vaincu : « En franchissant le seuil du monde divin, les portes de la Cité des Césars, nous rencontrerons tous les immortels qui y sont ressuscités, capables d'entrer dans une nouvelle vitesse du temps. La vitesse supertemporelle des Vimanas, ou OVNIs comme on les appelle aujourd'hui. Et nous serons face à face avec le Führer. Mais pour que tout cela réussisse, nous devons d'abord obtenir l'initiation à l'hitlérisme ésotérique… » (Ibid).

Encore une fois, l´extrapolation ésotérique sert d´exaltation d´une idéologie qui se pare des atours de l´interdit : « Serrano propose un nazisme mystique qui escamote les faits de la tyrannie, de la torture et de la répression dans le Troisième Reich avec un pot-pourri de mythes sur les héros SS, les villes fabuleuses et un millénaire aryen magique », écrit Goodrick-Clarke. « Dans leur parure New Age, ces mythes de rejet du monde gnostique et de projection de toutes les fautes et de tous les péchés sur un adversaire détesté agissent sur les jeunes esprits comme un puissant distillat du nazisme » (2002 : 192).

 

Bibliographie principale :

Joscelyn Godwin, Arktos: The Polar Myth in Science, Symbolism, and Nazi Survival, Londres, Thames and Hudson, 1993

Nicholas Goodrick-Clarke, Black Sun: Aryan Cults, Esoteric Nazism and the Politics of Identity, New York University Press, 2002

Walter Kafton-Minkel, Subterranean Worlds: 100,000 Years of Dragons, Dwarfs, the Dead, Lost Races, and UFOs from Inside the Earth, Loompanics Unlimited, 1983




[1] « Sommes-nous sur le point de voir se briser notre confortable image du monde selon laquelle Dieu a créé la terre en 7 jours, etc. etc. Et ainsi, encore et encore, nous devons revenir aux mêmes questions qui ne peuvent être répondues que par les mêmes réponses. Tous les gouvernements du monde semblent être frénétiquement engagés dans la suppression de l'histoire des ovnis. Les films sont confisqués, les pilotes ont reçu l'ordre d'intercepter et de tirer pour tuer les OVNI. Des personnes sont envoyées dans des hôpitaux et finalement dans des asiles d'aliénés parce qu'elles ont vu ou même été contactées par des OVNIs. Pourquoi ? Pourquoi ? » (Zündel, ibid)

[2] « Les équipages d'ovnis eux-mêmes donnent la plupart des réponses à ces questions. S'ils venaient d'autres planètes pour enquêter ou entrer en contact avec des Terriens, ils ne gaspilleraient pas leur temps précieux, leurs dépenses et leurs efforts considérables pour se déplacer en avion et nous faire voir des lumières clignotantes dans des marais ou des collines isolées dans le fond du monde. Ils feraient ce que nous ferions si nous avions des équipes d´astronautes qui enquêtaient sur une planète lointaine. (…) Pourquoi des représentants d'une civilisation suffisamment avancée pour parcourir les énormes distances nécessaires joueraient-ils au chat et à la souris avec quelques péquenauds du Mississippi ? La réponse est évidente, ils ne s'embêteraient tout simplement pas avec une telle farce et ce, sur une période de 30 ans !   (…) Ils doivent venir de la terre elle-même, ce qui ne peut qu'expliquer leur manque de curiosité et aussi leurs compétences linguistiques. Reinhold Schmidt affirme que les équipages de la soucoupe volante avec laquelle il a volé parlaient allemand » (Ibid)…

[3] Cit in Kafton-Minkel, 1989: 237