Le bungalow show
Le bungalow nord-américain est le plus souvent associé au conformisme et à la banalité de la banlieue. Construction considérée «anti-esthétique» qui confirme le règne de l’esprit pratique en Amérique, l’habitation pavillonnaire est devenue une figure marquante de l’imaginaire contemporain, mettant en jeu les frontières du public et du privé, de la norme et de la marge, du rêve et du réel. Véritable symbole de l’American Dream, le bungalow est aussi le lieu du secret, une façade qui suppose presque toujours un envers du décor.
Le bungalow a été chanté, photographié, filmé, écrit: nous en reste-t-il quelque chose de plus que les «little boxes» de Malvina Reynolds ou que les Deux femmes en or de Claude Fournier? Est-il la figure transparente, unidimensionnelle que le laissent penser ses variantes les plus célèbres? Y a-t-il un double fond à la petite boîte que serait le bungalow?
Pour ouvrir ce dossier, l'équipe de recherche Éric Lint et le centre de recherche Figura ont organisé un Bungalow Show, le 9 novembre 2012, au Département d'études littéraires à l'Université du Québec à Montréal. Les premiers résultats de recherche des représentations de la figure du bungalow dans l'imaginaire collectif sont diffusés ici dans la revue POP-EN-STOCK.
La 2e étape de cette recherche sera la tenue d'un colloque les 29 et 30 avril 2013 avec pour thème la banlieue en Amérique du Nord:
Colloque Suburbia, l'Amérique des banlieues
Lundi 29 Avril et mardi 30 Avril 2013 à l'UQAM.
La SCHL a été instaurée le 1er janvier 1946 en tant qu'instance suprême en matière d'habitation au Canada. Elle est principalement connue pour la gestion des politiques hypothécaires canadiennes, mais entre 1946 et 1974, elle a aussi contribué à l’élaboration de nombreux programmes encourageant la production de logements en tous genres, au sein desquels la maison individuelle de banlieue occupe une place privilégiée.
Dans l'Amérique de l'après-guerre, le bungalow est le lieu par excellence où la classe moyenne peut élever ses enfants blancs dans un environnement familial hétérosexuel et sain. Loin du dur labeur des villes, la famille dans son bungalow de banlieue incarne ce mode de vie idyllique et paradoxal qu'est l'American Way of Life: une vie simple et près de la nature, axée sur l’accumulation frénétique de biens.
Breaking Bad est une série télévisée produite par Vince Gilligan qui raconte l'histoire de Walter White, un chimiste qui avait un brillant avenir devant lui et qui est toutefois devenu professeur dans une école secondaire. Il s'est donc établi dans une maison relativement modeste avec sa femme Skyler, à Albuquerque, au Nouveau-Mexique. La série s'ouvre sur le cinquantième anniversaire de Walter.
La mise en scène d'un bungalow dès la séquence initiale de Blue Velvet (1986) de David Lynch le montre sans ambages: le bungalow est l'expression par excellence du rêve américain, utopie naïve reposant sur des valeurs toutes simples, pour ne pas dire simplistes, parmi lesquelles on note l'autonomie, la sécurité, la simplicité, la domestication de la nature, la famille, la prospérité, etc. C'est dire que le bungalow et la banlieue qu'il incarne sont les révélateurs d'une axiologie ancrée à même les assises de l'imaginaire américain.
La banlieue, territoire de prédilection de Stéphane Lafleur, prend l’allure d’un territoire sauvage à coloniser, un no man’s land traversé par les autoroutes, bordé par les champs et ponctué de boisés pour aller se perdre. Ses deux films, Continental, un film sans fusil (2007) et En terrains connus (2011), mettent en scène une esthétique du plus commun, avec en son centre le bungalow. Lafleur y fait l’inventaire de ce qui pourrait constituer l’ordinaire dans le cinéma québécois contemporain.
Plusieurs œuvres sur la banlieue la présentent sous l’angle du noyau familial en perdition: les préoccupations des parents sont superficielles, la mère a une aventure avec le voisin, le fils se drogue en cachette. Chacun vit seul avec ses secrets. Dans cette vision stéréotypée qu’incarnent Desperate Housewives ou Vice Caché, plusieurs adolescents, lorsqu’ils s’expriment, critiquent le mode de vie de leurs parents et affichent clairement leur haine de la banlieue.
«Ses vêtements se sont étalés et l’ont soutenue un moment, nouvelle sirène, pendant qu’elle chantait des bribes de vieilles chansons, comme insensible à sa propre détresse.» (Shakespeare, Hamlet)
Une adolescence en banlieue: tragédie en 93 alexandrins
La mélancolie, dans l’art comme dans la littérature, est présente dans un corpus d’œuvres considérable. On la reconnaît à son iconographie typique: des représentations d’hommes prostrés, la tête dans la main, semblant absorbés par une réflexion douloureuse. Cette posture communément appelée la figure de la tête penchée, c’est la pose de l’affliction que prend l’endeuillé. Or, tout ça, je ne sais pourquoi, me rappelle la tristesse des rues de mon enfance. À Brossard.
Limoges Ontario est un petit village perdu le long de la 417, entre Montréal et Ottawa, plus près d'Ottawa que de Montréal, une sorte d'excroissance trop loin de la Capitale pour être une banlieue et trop laide pour faire partie du patrimoine. Limoges Ontario est un festival de tôle, de plywood et de rouille dont l'âme se résume à l'église plantée au milieu du village, un oasis style Astérix où malgré l'envahisseur on continue à baragouiner le français.