Représentations, discours esthétiques et sang: le monument architectural comme métaphore de l'éternité dans From Hell d'Alan Moore et Eddie Campbell
D’abord publié sous la forme de onze comic books sur près d’une décennie (1989-1996) (Lainé: 137), le roman graphique From Hell (1999) du scénariste Alan Moore et du graphiste Eddie Campbell dépeint les cinq meurtres canoniques associés à la figure évasive du tueur en série Jack the Ripper comme ayant été commandités par la reine Victoria d’Angleterre. La mise en scène des assassinats des prostituées Polly Nicholls, Annie Chapman, Liz Stride, Kate Eddowes et Marie Kelly, tous perpétrés à l’automne 1888, de même que leur motif, met en lumière les conditions de vie de ces femmes du quartier de Whitechapel, «éternellement défavorisées parmi les défavorisés» (Marx: 432), tout en jetant un éclairage particulier sur la ville de Londres. Du paysage urbain se détachent en effet plusieurs monuments architecturaux qui, dans le roman graphique, se voient investis d’un symbolisme macabre et qui deviennent notamment les signes visibles d’une lutte entre le féminin et le masculin, la folie et le rationnel. À ces bâtisses londoniennes, encore existantes de nos jours, sont associées maintes significations, et leur représentation contribue à la création d’un lieu particulier à l’univers diégétique de From Hell.