YouTube Studies

YouTube Studies

 

L'univers vertigineux et virtuellement infini de YouTube, dont le Big Bang remonte à février 2005, est désormais un des faits de civilisation majeurs de ce début de millénaire. Avec 300 heures de nouvelles vidéos publiées chaque minute et milliard de visiteurs uniques par mois (qui y passent en moyenne quinze minutes par jour), il constitue le troisième site le plus visité d'Internet, après Google et Facebook.

Emblème de la «culture de la convergence» transmédiatique (H. Jenkins) qui caractérise la nouvelle iconosphère, YouTube est un conglomérat de bases de données transformées en spectacle, tout à la fois archive, bibliothèque et galerie multimédia, mais aussi réseau social (bien que son lien avec l'éthos Web 2.0 soit, en fin de compte, problématique) voire nouveau médium cannibale, émergeant de la phagocytose de tous ses prédécesseurs (cinéma, radio, télévision, vidéo, etc).

Héritière tout à la fois du vidéoclip, des home movies et du spot publicitaire qu'elle intègre en une synthèse protéiforme, l'esthétique du clip YouTube installe un rythme boulimique de consommation qui redéfinit notre rapport au récit et à l'image, ingurgité tous deux en des temps record avant d'être substitués par de nouveaux contenus surgis des multiples fenêtres qui entourent, tentatrices, toute capsule publiée dans le site.

Véritable invitation à la dérive labyrinthique dans une digression illimitée sous le signe de la surprise et la défamiliarisation permanentes, la mosaïque YouTube plonge le spectateur dans un polycentrisme nouveau où il est désormais le centre ex-centré de sa propre perception. C'est là où ce site hypermédiatique montre de façon éclatante tout ce qui le distingue du projet encyclopédique tel que pouvaient le concevoir l'âge classique et les Lumières.

Or, malgré l'importance cruciale de ce nouveau territoire du cyberespace qui est en passe de devenir une Gestalt à part entière celui-ci reste une véritable terra incognita dans les études académiques, à peine cartographiée par des anthologies pionnières telles que Video Vortex (Geert Lovink et Sabine Niederer, Amsterdam, INC, 2008) ou le YouTube Reader édité par Pelle Snickars et Patrick Vonderau en 2009 (Stockholm, KB).

C'est donc à l'émergence d’une véritable branche de médiologie culturaliste, les «YouTube Studies» que ce dossier voudrait modestement appeler. Toutes les approches (trans)disciplinaires pour tenter de cerner cette nouvelle iconosphère sont les bienvenues.

 

N'hésitez pas à nous envoyer vos textes. Les dossiers thématiques POP-EN-STOCK, comme les articles individuels, sont à soumission ouverte. Une fois un numéro thématique «lancé», il demeure ouvert, indéfiniment, à quiconque voudrait y soumettre une collaboration. Le(s) directeur(s) d’un dossier s’engage(nt) à évaluer et éditer les nouvelles propositions à leur dossier pour une durée de deux ans, sous la supervision des directeurs de la revue.

La longueur des articles est variable. POP-EN-STOCK accepte une limite inférieure équivalente à sept ou huit pages (3000 mots), afin de favoriser la publication rapide, mais peut aussi accepter des articles beaucoup plus longs selon l’offre (n’étant pas limitée par un impératif de préservation de la forêt boréale).

 

Blogue associé: Les études sur YouTube.

Dossier(s) associé(s): 
Soumis par Antonio Dominguez Leiva le 3/02/2014

La dernière sensation virale sur le Web (plus de 10 millions de vues en 5 jours), en ce 3 février 2014, est une publicité australienne écrite et réalisée par Henry Inglis et Aaron McCann, «Set Yourself Free». Ce petit conte cruel de 1'46 minutes mobilise les tropes du film d’horreur contemporain (par, notamment, la reductio ad absurdum du wrong turn) contre la rhétorique émancipatrice de la «révolte consommée» étudiée par Joseph Heath et Andrew Potter dans leur ouvrage homonyme.

Soumis par Mathieu Bergeron le 17/09/2013
Catégories: Cyberespace, Numérique

Avec l’essor de YouTube vers 2005, on a assisté à l’émergence d’un nouvel objet culturel de masse: la vidéo virale. Si la vidéo virale semble d’emblée propre à la culture dominante américaine, son essor n’a pas épargné le Québec.

Soumis par Megan Bédard le 20/05/2013
Catégories: Cyberespace, Numérique

Une communauté est un «[g]roupe social ayant des caractères, des intérêts communs [ou encore l']ensemble des habitants d'un même lieu, d'un même État», ce qui implique alors une proximité physique entre les individus d'une même communauté une langue commune ainsi que des références culturelles communes. L'avènement des Réseaux et d'Internet dans les années 1990 engendre un nouveau type de communauté, ce qu'Howard Rheingold a identifié comme étant des «communautés virtuelles».

Soumis par Thibault Christophe, Muriel Plana le 3/05/2013
Catégories: Web, Numérique

Pour analyser plus précisément ces fragments audiovisuels, nous nous sommes d’abord attachés à faire le tour de la littérature scientifique du clip vidéo musical. Là encore, nous avons pu constater non seulement que l’objet n’est pas légitimé les quelques fois où il est évoqué, mais que, d’une manière générale, cette forme d’expression est très peu théorisée dans les écrits scientifiques français.

Soumis par Thibault Christophe, Muriel Plana le 3/05/2013
Catégories: Web, Numérique

«La dévotion à la Littérature et à l’Écriture est une grande passion/mythologie française comme chacun sait. C’est plutôt la question des dispositifs, des agencements d’énonciation qui me paraît fondamentale. C’est un problème d’éthique épistémopolitique… Tu dois savoir d’où tu écris. Avec qui tu agences.» (M. H. Bourcier, Queer Zone 3, p. 143.)

Soumis par Antonio Dominguez Leiva le 14/11/2012
Catégories: Cyberespace, Numérique

À travers les catégories du néobaroque dégagées par Calabrese dans son étude visionnaire et matérialisées par l’univers YouTube on a pu constater le long des précédents articles que les formes stables, ordonnées, régulières ou symétriques sont systématiquement inversées dans un vertige d’un type tout à fait nouveau. Cette folie qui a nom YouTube émerge précisément au moment où le système des valeurs est déstabilisé par des phénomènes de fluctuation et d'indétermination, la société globalisée de l'information éclipsant les catégories du capitalisme industriel, mais orchestrant un nouveau stade du néolibéralisme.

Soumis par Antonio Dominguez Leiva le 16/04/2012
Catégories: Cyberespace, Numérique

Ce désordre malgré tout programmé trouve, comme au XVIe siècle, une figure privilégiée dans le labyrinthe, image récurrente lorsqu’on évoque YouTube et la Toile. Bertrand Gervais insiste à juste titre sur la réactivation de la figure millénaire du labyrinthe pour faire face, un peu à la façon d’un atavisme imaginaire, à la perplexité contemporaine.

Soumis par Antonio Dominguez Leiva le 16/04/2012
Catégories: Cyberespace, Numérique

Dominé tout à la fois par le fragment et le détail, YouTube pousse aussi ces deux catégories chères à Calabrese jusqu’à l’hypertrophie. La fragmentation est la base même du découpage des contenus YouTube, que ce soit sous la forme d’extraits parasités d’autres médias (d’émissions télé, de films, de matchs, etc.) ou du contenu créé expressément pour sa diffusion sur le site.

Soumis par Antonio Dominguez Leiva le 16/04/2012
Catégories: Cyberespace, Numérique

C’est six ans après le célèbre Video Killed the Radio Star des Buggles qui inaugurait de façon étrangement ambivalente (le groupe s’inspirait d’une nouvelle dystopique de J. G. Ballard sur un monde d’où la musique aurait été bannie) l’avènement de l’industrie culturelle du vidéoclip et l'année même où Madonna se phagocytait elle-même pour la première fois dans les remix (pratique alors toute nouvelle) de You Can Dance que le sémiologue italien Omar Calabrese théorisait L’ère néobaroque (1987) dans une étude magistrale qui a dû souffrir un long ostracisme avant de revenir en force dans le tournant du XXIe siècle.